Préparations – L’Equipage en Mer

Préparations – L’Equipage en Mer

Après la théorie, un peu de pratique pour tester Saudade et son équipage. Il ne faut pas croire qu’acheter un bateau neuf permet d’éviter les incidents.
Bien au contraire, avant le grand départ, il est préférable d’accumuler les jours de mer, les miles nautiques, les manœuvres de port, les changements de voile, la navigation de nuit, le fonctionnement des différents équipements, la vie à bord. Le bateau comme son équipage doit s’amariner.

Les anglais affirment que si, une personne ne connaissant pas la voile, souhaite en découvrir les sensations, il lui suffit de prendre une douche d’eau froide tout habillée en déchirant des billets de banque. J’aime beaucoup ce trait d’esprit à l’humour britannique mais il est somme toute quelque peu réducteur.

Partir en mer avec son nouveau voilier, c’est une émotion particulière, souvent l’aboutissement d’un rêve lointain, pour ma part celui d’un petit garçon qui contemplait pendant des heures avec gourmandise les mappemondes, d’un adolescent qui s’enivrait à tracer des routes imaginaires sur des cartes marines, d’un jeune homme qui naviguait pour aller flairer l’odeur et la beauté des choses entr’aperçues dans les livres mais aussi la mise en œuvre d’un nouveau projet de vie.
Alors c’est un pèle-mêle de fierté, de sens d’un accomplissement, d’un enthousiasme serein, d’émerveillement. Partir en voyage, c’est tout sauf une fuite au sens commun du terme, même si je partage le point de vue d’Henri Laborit qui en a fait l’éloge:

« Quand il ne peut plus lutter contre le vent et la mer pour poursuivre sa route, il y a deux allures que peut encore prendre un voilier: la cape (le foc bordé à contre et la barre dessous) le soumet à la dérive du vent et de la mer et la fuite devant la tempête en épaulant la lame sur l’arrière, avec un minimum de toile. La fuite reste souvent, loin des côtes, la seule façon de sauver le bateau et son équipage. Elle permet aussi de découvrir des rivages inconnus qui surgiront à l’horizon des calmes retrouvés. Rivages inconnus qu’ignoreront toujours ceux qui ont la chance apparente de pouvoir suivre la route des cargos et tankers, la route sans imprévu imposée par les compagnies maritimes de transport ».

Partir en voyage, c’est l’attraction d’un monde nouveau, du changement, de l’autre. C’est l’extraordinaire tentation de l’immensité. C’est prendre la conscience du temps qui passe pour s’offrir une chance de l’apprivoiser.

Pour cette navigation de quatre semaines, les équipiers, novice aux choses de la mer sont enthousiastes et ne demande qu’à apprendre le jargon maritime, les nœuds, le nom des nombreux bouts, des voiles, l’art des manœuvres, le nom des étoiles, celui des nuages, les courants marins et les marées, les différentes marques de balisage et la lecture des cartes…

Alors quand sur la carte, ils découvrent le Passage de la Déroute, la balise « Comme tu pourras », la cardinale de la Moisie qui vous conduit au Plateau des Échaudés, que celui qui voit Molène voit sa peine puis son sang à Ouessant et sa fin à Sein, le tout pour finir à la baie des Trépassés, il en faut de l’enthousiasme et du meilleur.

Allez un Ti Punch et haut les cœurs pour quelques incidents d’amarinage.

Le premier jour, une gaffe et un pare battage à la mer.

Le deuxième jour, le propulseur d’étrave qui nous abandonne en pleine manœuvre venteuse à Saint Quay Portrieux, la cosse de la batterie arrachée, il reste désespérément sans énergie.
C’est au nouveau port de Roscoff que nous effectuons la réparation. Pour cela, il nous faut une cosse de batterie afin de rebrancher le câble de la batterie dédiée au propulseur et au guindeau. Le port est tout neuf, le personnel aussi, le garçon qui nous accueille avoue que c’est son premier accueil de voilier et semble bien ennuyer avec l’amarre qu’il a pris en main. Lorsque je lui demande où il est possible de trouver un schipchandler, il ne sait pas ce que cela signifie.
Il faut préciser à sa décharge que sur le périmètre du port, la voilerie n’est pas plus en mesure de nous indiquer un chantier naval ou un mécanicien automobile à proximité.
Heureusement, à moins d’un kilomètre, nous apercevons le Chantier Naval Yvin. C’est la patronne en plein ponçage qui nous accueille avec un grand sourire. Elle n’a pas de cosse mais connaît bien le mécanicien dit, du cimetière. Il a une cosse et il ne fait pas le mort puisqu’il passe nous l’apporter dans les cinq minutes. Un certain sens de la serviabilité et de la gentillesse.

Le troisième jour, au large des Héaux de Bréhat, belle mer, bon vent. Je regarde le Solent bien gonflé, puis moins, puis plus du tout. Il vient de tomber à l’eau. Pas de panique, il suffit de le remonter à bord, de constater que la manille de jonction à l’enrouleur de tête de mat s’est ouverte, de le plier aussi bien que possible, de l’entasser dans le local technique, et d’envoyer la trinquette.
Cela donnera une bonne opportunité de monter en haut du mat, une première, et de prendre de belles photos de Saudade vu du ciel.

Et un, et deux, et trois, voilà c’en est fini des incidents pour le moment…

Il est temps de se remettre à l’apprentissage du jargon maritime, des nœuds, du nom des nombreux bouts, des voiles, de l’art des manœuvres, du nom des étoiles, de celui des nuages, des courants marins et des marées, des différentes marques de balisage et de la lecture des cartes…

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